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Est-ce la fin du tarif réglementé EDF pour les particuliers ?

Cela fait quelques semaines que les médias parlent de la fin des tarifs réglementés de l’électricité. Or, une telle annonce n’est pas sans susciter quelques préoccupations chez les particuliers. C’est par ailleurs la fin du tarif réglementé de vente (TRV) du gaz pour tous (particuliers et professionnels), intervenue le 1er juillet 2023, qui a engendré son lot de spéculations quant à la fin du tarif réglementé EDF pour les particuliers.

 

Mais alors, qu’en est-il concrètement ? Ce dernier va-t-il suivre la même évolution que le tarif réglementé de vente du gaz ? C’est ce que nous vous proposons de découvrir.

Sommaire de l'article

I. Tarifs réglementés de l’électricité : qu’est-ce que c’est ?

Avant d’aller plus loin, faisons un rappel de ce que sont les tarifs réglementés de l’électricité. Car, en effet, vous connaissez certainement mieux le tarif réglementé de vente sous son autre appellation : le Tarif Bleu EDF.

1. Le tarif réglementé de vente : explications

Le tarif réglementé de vente de gaz et d’électricité existe depuis 1946 suite à la loi de nationalisation de ces deux types d’énergie. À cette époque, la nationalisation a réuni tous les distributeurs d’énergie privés au sein de deux entités : EDF (Électricité de France) pour l’électricité et GDF (Gaz de France) pour le gaz. Ces dernières détenaient alors le monopole sur tout le territoire français.

 

Toutefois, plusieurs collectivités et certains propriétaires de réseaux de distribution de l’énergie ont rapidement réclamé le droit de conserver leur indépendance. Concrètement, ces réseaux autonomes correspondent aujourd’hui aux entreprises locales de distribution (ou distributeurs non nationalisés), plus connues sous l’abréviation ELD.

 

Depuis cette époque, les tarifs réglementés de vente d’énergie (gaz et électricité) sont fixés par les pouvoirs publics, et plus spécifiquement par le ministère de la Transition écologique et solidaire et le ministère de l’Économie et des Finances, sur proposition de la Commission de régulation de l’énergie (CRE).

 

Bon à savoir : Les tarifs réglementés de l’électricité sont réévalués deux fois par an, en février et en août. C’est pourquoi une hausse ou une baisse du prix intervient deux fois par an.

 

Ces tarifs réglementés de l’électricité fixés par les pouvoirs publics peuvent uniquement être appliqués par les fournisseurs historiques (EDF et GDF) ou, sur 5 % du territoire français, par une entreprise locale de distribution (ELD).

 

Pour le reste, étant donné que le fournisseur historique EDF n’a plus le monopole depuis l’ouverture du marché de l’électricité à la concurrence le 1er juillet 2007 (pour les particuliers), le tarif réglementé de vente d’électricité coexiste avec d’autres offres de marché.

2. Offres de marché et tarifs réglementés de vente : la différence

Pour faire simple, les offres de marché sont librement fixées par les fournisseurs alternatifs à EDF, sans aucune intervention des pouvoirs publics. Un fournisseur alternatif peut alors proposer des offres à prix plus avantageux que les tarifs réglementés, ou au contraire plus chères. Quoi qu’il en soit, les particuliers peuvent souscrire à l’offre de leur choix (Engie, TotalEnergie, Méga Énergie, etc.).

 

Notez qu’il existe différents modèles de contrats d’offres de marché pour l’électricité, variable d’un fournisseur alternatif à un autre, à savoir :

  • des offres à prix indexés, avec un tarif qui fluctue selon le tarif réglementé d’électricité (TotalEnergie, Méga Énergie, etc.) ;
  • des offres à prix fixes durant 1 à 4 ans, afin d’éviter les augmentations du tarif réglementé de vente (Mint Énergie, TotalEnergie, etc.) ;
  • des offres duales (gaz et électricité), comme Cdiscount Énergie et Engie, pour ne citer qu’eux ;
  • des offres vertes (électricité par éolienne, par exemple), pour réduire l’empreinte carbone de votre consommation électrique (Méga Énergie, OHM Énergie).

À ce stade de votre lecture, vous comprenez sans doute bien mieux de quoi il est question lorsqu’on parle de tarifs réglementés de l’électricité et d’offres de marché.

3. Comment sont déterminés les tarifs réglementés de l’électricité ?

Comme nous l’évoquions plus haut, les tarifs réglementés de l’électricité sont fixés par les pouvoirs publics. À ce titre, la Commission nationale des régulations de l’énergie (CRE) utilise la méthode de calcul dite « par empilement » pour déterminer le montant du tarif réglementé de vente d’électricité, et ce, deux fois par an. Cette étape se base sur un ensemble de critères, dont :

  • le prix de l’ARENH (accès régulé à l’électricité nucléaire historique) ;
  • le coût du complément d’approvisionnement au prix de marché ;
  • la garantie de capacité ;
  • les coûts d’acheminement de l’électricité ;
  • les coûts de commercialisation ;
  • la rémunération normale de l’activité de fourniture d’électricité.

L’idée ici n’est pas de rentrer dans les détails du calcul et des critères, mais plutôt de comprendre que le calcul par empilement entend favoriser la libre concurrence. En effet, les critères retenus doivent permettre à un fournisseur alternatif de proposer des offres à prix égaux ou inférieurs aux tarifs réglementés.

 

Malgré une volonté affichée de contenter tous les fournisseurs (historiques comme alternatifs), les tarifs réglementés de l’électricité ne font toutefois pas l’unanimité.

 

Effectivement, les fournisseurs alternatifs souhaitent que les tarifs réglementés de vente soient supprimés. Ils estiment que ces derniers seraient contraires au droit européen (règles fixées par le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne), comme cela a été le cas pour les tarifs réglementés du gaz. En outre, ils constituent, selon eux, une entrave à la libre fixation des prix de l’électricité.

 

Le débat sur la fin des tarifs réglementés de l’électricité est donc à l’initiative des fournisseurs alternatifs, et surtout, il fait suite à la décision du Conseil d’État quant aux tarifs réglementés du gaz.

II. Tarifs réglementés de l’électricité : que dit la réglementation européenne ?

Souvenez-vous, nous vous parlions de la constitution d’un marché unique de l’électricité et du gaz avec la loi de nationalisation de 1946. Néanmoins, depuis son entrée dans l’Union européenne en 1993, la France doit s’adapter aux nouvelles réglementations communes à tous les pays membres.

 

Le droit communautaire (ou droit européen) regroupe les différentes règles de l’Union européenne (UE), traités, directives, réglementations et jurisprudence, qui forment ainsi le système juridique commun à tous les pays membres de l’UE. Or, ce droit communautaire doit être respecté par tous les pays membres. C’est ce que l’on appelle la primauté du droit européen sur le droit national.

 

C’est notamment pour cette raison que le marché de l’énergie a été ouvert à la concurrence (dès 1999 pour les grosses entreprises et en 2007 pour les particuliers), parce qu’il s’agissait d’une règle européenne.

 

En France, c’est le Conseil d’État (la plus haute des juridictions de l’ordre administratif) qui veille à la bonne application du droit européen. Et justement, le 19 juillet 2017, celui-ci a jugé que les tarifs réglementés du gaz étaient contraires au droit européen et aux règles imposées au marché intérieur de l’énergie. Il estimait alors que les tarifs réglementés du gaz entravaient la libre concurrence, ce qui a tout simplement abouti à leur suppression le 1er juillet 2023.

 

Cela va de soi, cette décision n’a pas été sans conséquences. Depuis, Engie (anciennement GDF, opérateur historique de gaz et fournisseur alternatif d’électricité) et plusieurs fournisseurs alternatifs d’électricité (dont TotalEnergies) associés pour former l’ANODE, l’Association Nationale des Opérateurs Détaillants en Énergie, dénoncent le tarif réglementé de vente de l’électricité. Comme elle l’avait déjà fait pour le gaz, l’ANODE a donc saisi le Conseil d’État pour demander la suppression des tarifs réglementés de l’électricité.

III. Est-ce la fin du tarif réglementé de l’électricité ?

Pour savoir si c’est la fin du tarif réglementé de l’électricité, il faut s’intéresser à la décision du Conseil d’État du 18 mai 2018. La haute autorité a en effet estimé que « l’entrave que constitue la réglementation des prix de vente de l’électricité est justifiée. […] Dans un contexte de forte volatilité et s’agissant d’une énergie non substituable constituant un bien de première nécessité, l’objectif de stabilité des prix est également de nature à justifier une entrave au développement de la concurrence sur le marché de détail de l’électricité […] par la poursuite de l’objectif de garantir aux consommateurs un prix de l’électricité plus stable que les prix de marché ».

 

En d’autres termes, par cette décision, le Conseil d’État indique que le tarif réglementé de l’électricité sert à contenir une éventuelle envolée des prix de l’énergie électrique et à offrir une meilleure visibilité des prix de l’électricité (jusqu’à 6 mois, puisqu’il est revu 2 fois par an).

 

De plus, le Conseil d’État a estimé que le tarif réglementé de l’électricité n’empêche pas les autres fournisseurs de fixer librement le prix de leurs offres. Toujours dans sa décision du 18 mai 2018, il dit d’ailleurs que « cette réglementation assure l’égal accès des entreprises d’électricité aux consommateurs, puisque ces derniers peuvent opter à tout moment et sans frais pour une offre de marché ».

 

Enfin, la haute juridiction a également conclu que les tarifs réglementés de l’électricité répondent à un objectif d’intérêt général.

 

La requête de l’ANODE et d’Engie a donc été déboutée. La fin du tarif réglementé d’électricité pour les particuliers n’est donc pas à l’ordre du jour.

 

Ne confondez donc pas ce dernier avec la levée du bouclier tarifaire, une mesure très différente. Effectivement, en octobre 2021, le gouvernement français met en place le bouclier tarifaire dans le cadre de la loi de finances 2022. L’objectif est de protéger les Français face à l’augmentation des prix de l’énergie. S’il devait initialement prendre fin en 2023, Bruno Le Maire (ministre de l’Économie et des Finances) a annoncé le 21 avril 2023 que le bouclier tarifaire sur l’électricité (y compris les tarifs réglementés) sera prolongé de deux ans, soit jusqu’en 2025. Une sortie progressive du dispositif est cependant prévue, mais celle-ci entraîne une hausse régulière et relativement conséquente des tarifs de l’électricité, ce qui concoure à l’ambiguïté de la situation liée au tarif réglementé de vente.

IV. La fin du tarif réglementé d’électricité : pour qui ?

Pour répondre de manière complète à la question de la fin du tarif réglementé de l’électricité, faisons un point sur les personnes concernées par la fin des tarifs réglementés de l’électricité.

 

Comme nous l’évoquions, les tarifs réglementés de l’électricité ont bien été supprimés pour certains consommateurs (et pas pour les particuliers). C’est par exemple le cas pour les entreprises françaises qui ont une puissance souscrite maximale supérieure à 36 kVA, et ce, depuis le 31 décembre 2015.

 

Depuis le 1er janvier 2021, les tarifs réglementés de l’électricité ont aussi été supprimés pour l’ensemble des professionnels (considérés comme clients non résidentiels), à l’exception des micro-entreprises.

 

Ce qu’il faut retenir ici, c’est que la suppression du tarif réglementé du gaz au 1er juillet 2023 a suggéré une potentielle fin du tarif réglementé de l’électricité pour les particuliers, une spéculation entretenue par l’annonce de la fin progressive du bouclier tarifaire qui a pu accentuer ce doute. Pourtant, à l’heure actuelle, la fin du tarif réglementé EDF pour les particuliers (pour toute souscription d’une puissance comprise entre 3 et 36 kVA) n’est pas annoncée.

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